La FRC porte plainte contre la marque ON
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Hasard du calendrier ou pas, alors que la marque ON connaissait son quart d’heure de gloire lors du Super Bowl, avec un Roger Federer amené à expliquer au public américain comment lire le logo de cette marque – la typographie pouvant créer une confusion avec les lettres Q et C –, la FRC porte plainte contre l’équipementier suisse pour greenwashing.
L’objet du litige
Le slogan « Courir. Recycler. Recommencer. », qui évoque la devise de l’économie circulaire : réduire, réutiliser, recycler. Comme le déplore la FRC, les références à la circularité des produits concernés sont omniprésentes sur le site, à commencer par le nom du programme Cyclon™, qui promet : « Nous les fabriquons. Vous les portez. Une fois usés, nous les recyclons pour en faire de nouveaux éléments pour chaussures. »
La FRC s’appuie également sur le reportage de Temps Présent de juin 2024 ainsi que sur des échanges directs avec la marque. Non satisfaite des réponses obtenues, elle invoque la Loi contre la concurrence déloyale pour porter plainte contre l’équipementier devant la justice zurichoise.
Faut-il juger le chemin parcouru ou ce qui reste à accomplir ?
Telle sera la question à laquelle devra répondre la Commission suisse pour la loyauté. Cette dernière a publié, le 22 novembre 2023, une directive intitulée « CSL-Directive-Communication-commerciale-avec-des-arguments-enrironnementaux ».
Il en ressort notamment une obligation de véracité, qui impose à l’auteur de la publicité d’apporter la preuve du contenu des représentations, allégations et indications environnementales. Des calculs plausibles et vérifiables, réalisés selon des méthodes généralement reconnues, doivent être présentés à la Commission Suisse pour la Loyauté (CSL).
De plus, il est nécessaire de prouver de manière crédible l’efficacité des mesures compensatoires, et tout éventuel certificat doit être présenté. L’annonceur a la charge de prouver l’ensemble des éléments et du contexte relatifs aux allégations environnementales. Toutefois, il peut demander que ces preuves soient traitées de manière confidentielle.
Que nous révèle la dernière marque de la marque?
Si l’on se réfère à la dernière publicité de la marque, on comprend que son problème est aujourd’hui davantage lié au branding qu’à la durabilité. Le coût d’un spot durant le Super Bowl en 2025 a été de 8 millions de dollars pour 30 secondes. À ce prix-là, il faut aller droit au but. Ce qui pose problème sur le marché américain -le plus important pour la marque-, c’est le design du logo qu’un consommateur non averti ne sait pas comment le lire. D’autres marques ont déjà été confrontées à ce type de confusion.
En effet, la marque Nike, lorsqu’elle a voulu s’implanter en France, a rencontré un problème quasi similaire. Le public hexagonal prononçait le logo à la française, ce qui donnait : « nique », du verbe niquer. Qui voulait acheter et porter une paire de chaussures avec un nom aussi sulfureux ? Tout le travail des publicitaires a alors consisté à enseigner la bonne prononciation aux francophones. Ainsi, dans toutes les publicités, le nom de la marque était systématiquement prononcé jusqu’à ce que, finalement, le logo évolue en une virgule, mettant ainsi fin à ces problèmes linguistiques.
La question du naming est donc fondamentale. L’association avec Roger Federer est également essentielle. Au moins, on voudra les chaussures de RF! Ce n’est donc pas par hasard que l’on a fait appel à une des marionnettes du Muppet Show. Notoriété, enfance, amabilité, tout dans ce message veut faire passer la bienveillance. Ce n’est pas le consommateur qui a tort mais bien la marque qui s’est montrée trop créative. Avec ce spot, on cherche à informer, rassurer et amuser. Que l’on soit allé chercher un univers si régressif montre bien qu’il y a péril en la demeure !
Quel positionnement marketing?
La marque ON s’est positionnée dès le départ comme une entreprise innovante. Le marché de la chaussure de sport est extrêmement compétitif, et s’y faire une place n’est possible qu’en se différenciant de ses concurrents. Depuis sa création en 2010, cette société revendique une technologie d’amorti exclusive dans ses chaussures comme argument de vente unique : une conception brevetée appelée CloudTec®. Voilà pour le P de produit.
Le P de positionnement est aujourd’hui porté par le concept Cyclon™, qui propose au consommateur de recevoir une paire de baskets fabriquée à partir de matériaux biosourcés, qu’il doit utiliser pendant six mois minimum avant de l’échanger contre une nouvelle paire. L’ancienne est alors censée être recyclée. C’est nouveau mais exigeant. Il faut que toute la chaîne de production soit vertueuse. Au vue des nombreuses attaques, elle ne l’est visiblement pas. La communication est trop explicite, elle aurait dû être formulée comme une promesse, un objectif à venir. Si l’on lit attentivement toute la documentation ESG du site, on découvre les étapes de cette proposition. Dommage que tout le texte ne soit qu’en anglais.
L’autre critique évoquée est le P de prix, ici les marges semblent trop importantes et les salaires des employés trop bas. L’économie circulaire doit profiter à tout le monde !
Qui trop embrasse, mal étreint!
Le développement de cette marque est fulgurant. Dès 2020, ses produit étaient disponibles dans près de 6 000 détaillants dans 55 pays. Le nombre de boutiques propre ne cesse de croître En 2025, les États-Unis sont devenus le plus grand marché de cette entreprise suisse, avec une part de marché de 6,6 %. La vision aura-t-elle devancer la réalité ? Nous le saurons dans les prochains mois.
Le plan ESG de la marque